Dans le laboratoire d’une équipe de recherche en neuroingénieurie de l’université Miguel Hernandez (en Espagne) la dame teste, depuis 2018, un système qui fonctionne comme suit : une caméra intégrée à une paire de lunettes épaisses enregistre son champ de vision et l'envoie à un ordinateur. Ce dernier traduit les données en impulsions électriques que le cerveau peut lire et les transmet à un implant cérébral au moyen d'un câble connecté à un port sur le crâne. L'implant stimule les neurones du cortex visuel de l’intéressée et son cerveau interprète les stimuli comme des informations sensorielles entrantes. La patiente peut alors percevoir une représentation à faible résolution de son environnement sous la forme de points jaunes et de formes appelées phosphènes qu'elle a appris à interpréter comme des objets du monde qui l'entoure.
Si l’idée de base derrière le système semble aussi simple, les détails sont plus corsés. Le laboratoire est en étroite collaboration avec un hôpital qui lui fournit les rétines de personnes décédées (une rétine est utile pour une durée estimée à 7 heures après lesquelles elle meurt). Ces dernières sont nécessaires à la compréhension des signaux électriques sur laquelle l’équipe s’appuie pour peaufiner la partie mise sur pied de la caméra. Les chercheurs usent aussi de techniques d’apprentissage machine pour établir des correspondances entre le signal électrique fourni par les rétines et de simples stimuli visuels. La manœuvre leur permet de mettre sur pied des logiciels d’automatisation du procédé.
L’étape suivante consiste à transmettre ce signal au cerveau. Cela se fait via une connexion filaire (à partir d’un ordinateur de traitement des données) avec l’implant plus petit que la pointe surélevée de l’extrémité positive d’une pile AAA. De l'implant sortent 100 minuscules pointes d'électrode, chacune d'environ un millimètre de haut. Ensemble, elles ont l’aspect d’un lit de clous. Chaque électrode peut délivrer un courant à un maximum de quatre neurones. Lorsque l'implant est inséré, les électrodes percent la surface du cerveau ; lorsqu'il est retiré, 100 minuscules gouttelettes de sang se forment dans les trous laissés vides.
Grâce à ce setup, la patiente est parvenue à identifier des plafonniers, des lettres, des formes de base imprimées sur du papier et des personnes. Elle a également joué à un jeu informatique dans le style PacMan dont les contenus visuels lui sont parvenus directement via son cerveau. Le système serait capable de fournir au patient un aperçu de son champ de vision avec une résolution maximale de 10 pixels par 10 pixels. L’équipe de recherche envisage des résolutions de 60 pixels par 60 pixels et plus lorsqu’elle prend en compte la possibilité d’intégrer plusieurs implants au cerveau d’un patient. À date, les inconvénients majeurs liés à ce système sont liés au fait que le procédé est intrusif. En effet, il y a que le système immunitaire réagit à l’insertion de l’implant ce qui fait que le patient ne peut le garder pour plus de 6 mois. L’équipe de recherche fait aussi état de risques de dégradation du cerveau qui peuvent résulter des déformations des électrodes lors de mouvements du patient. Résultat : les opérations de rechange sont programmées tous les deux à trois ans au maximum.Toutefois, les membres de l’équipe de recherche anticipent sur une durée d’une dizaine d’années en s’appuyant sur les avancées possibles d’ici là.
Tests de la caméra par l’équipe de recherche
Ces travaux font suite à ceux d’autres équipes de recherche qui ont mis sur pied des systèmes destinés à des personnes atteintes de maux liés non pas à une lésion des nerfs optiques, mais à la rétine. Sur la décennie précédente, on peut mettre les systèmes Argus I et II dans ce lot. Ces yeux bioniques ont reçu l’approbation des autorités en Europe (2011) et aux USA (2013). D’après les développements en cours, des centaines de personnes feraient usage du système Argus II.
Source : Technology Review
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